Le dernier article a fini en queue de poisson, et je pense que maintenant vous savez à peu près tous ce qui nous est arrivé. Ca vaut tout de même la peine de le raconter. Accrochez vous, on en a vu des vertes et des pas mûres…
Nous voilà dans la dernière partie de la traversée du Baloutchistan Pakistanais, il reste 300 kilomètres à parcourir entre Dalbandin à la frontière Iranienne. La veille, on a roulé jusqu’à une heure du matin, et arrivé à l’hôtel on nous a annoncé qu’on reprennait la route à 4H du matin. Pourquoi? Parce que 16 motards pakistanais font ce tronçon de route eux aussi. Et on les connait ces motards, c’est le moto club de LAHORE, dirigé par Mukaram chez qui nous avons séjourné lorsqu’il faisait si chaud et que Gaël a été malade à cause de la chaleur. Nous n’avons pas d’autres choix que de partir au même moment qu’eux. Leur passage est très médiatique, les escortes sont réquisitionnées en partie pour eux, alors si on rate le coche on se retrouvera en stand by à un check point en attendant que quelqu’un soit disponible pour nous. Nous ne devons pas perdre de temps au risque de ne pas pouvoir passer la frontière aujourd’hui, l’idée de dormir là bas ne nous enchante pas, c’est un lieu de magouille, et un des points noirs au niveau sécurité.
Le jour n’est pas encore levé lorsqu’on prend la route, c’est presque agréable et beau, ce silence, ce coté sauvage et désertique de cette partie du pays. On sait qu’on en a fini avec cette partie du voyage un peu périlleuse, sous escorte, là où on ne sent pas le danger mais où il semble exister. Puis le vent se lève, timide au début, puis plus pressant pour enfin devenir une tempête de sable…



… comme on en n’avait jamais vu encore. Ça rentre de tous les côtés dans Polo, on en a sur nous jusque dans la bouche, tu sais, comme quand tu essayes de manger un truc à la plage et que ça craque sous la dent.
On a bien du mal d’avancer et on sent que le camping-car perd en vitesse. On se dit que c’est dû à la force du vent qui nous arrive par la droite. On roule malgré tout, le sable s’entasse sur la route et Polo n’a même plus la force de passer les congères… On cale une première fois, on bloque la circulation et on a bien du mal à redémarrer. Il nous reste alors une centaine de kilomètres à parcourir.
Quand on reprend la route, Polo perd encore de la puissance, on roule maintenant à 30km/h maximum. On cale de plus en plus souvent, et pour redémarrer c’est vraiment galère. Le moteur chauffe, ça ne peut plus être dû à la tempête, le problème est plus sérieux. Pour rappel, nous sommes dans le Baloutchistan Pakistanais, zone sous escorte dans laquelle on n’a pas spécialement envie de traîner et on espère pouvoir sortir de là « en roulant ». On cale une dernière fois et on ne redémarrera plus du tout. C’est vraiment pas cool, mais là ou on a de la chance, (toujours voir le verre plein), c’est qu’on a bien tiré sur Polo, il ne nous reste plus qu’une dizaine de kilomètres avant la frontière.
On a notre escorte avec nous, ça nous rassure d’être avec quelqu’un et on imagine qu’on va pouvoir compter sur lui. Il se révèle qu’il n’est pas des plus débrouillards. C’est plutôt Ju qui se démène pour arrêter les voitures et essayer de trouver un moyen de se dépatouiller de cette m****.
On est vraiment inquiet pour le moteur même si le peu de gens (région plutôt désertique, c’est le cas de le dire) qui s’arrêtent pour nous aider nous assurent que « c’est rien' », « juste un petit problème ». Dans ces contrées, on a plutôt tendance à relativiser.
On doit trouver de quoi se faire remorquer. L’escorte n’a ni radio, ni téléphone. Pratique. Alors ju part à pied au poste contrôle suivant à 1,5 km pour trouver de l’aide. Les militaires ne peuvent nous venir en aide, pas de véhicules, pas de matériel. Julien arrête alors un type en camionnette et moyennant monnaie, il nous tire jusqu’à la frontière, la corde nous reliant cassant à peu près tous les kilomètres.
On ne parle pas la même langue avec le conducteur du véhicule, mais on fait tout pour lui faire comprendre qu’il doit absolument nous faire « passer » la frontière, autrement dit poser POLO côté Iranien. Hors de question de passer la nuit au Pakistan. L’horloge tourne, il est presque 16h et le poste frontière va fermer. On stresse.
On court pour faire la paperasse côté Pakistanais, on prie pour que le type qui nous remorque ne se soit pas fait la malle quand on ressort des bureaux. Il honore le deal, (il a gagné en 2h le salaire d’un mois de travail). Il nous lâche devant les barrières iraniennes alors que les gardes hésitent à nous faire rentrer, il serait déjà trop tard. Il doit être 15H55. De toutes façons, nous sommes officiellement sortis du Pakistan, nos passeports ont été tamponnés. La porte s’ouvre, on fait entrer Polo en le poussant. OUF.
Il nous reste à faire les papiers d’entrée dans le pays, et on rêve d’une nuit dans un lit dans un hôtel. On y verra plus clair demain.
Quand la tension commence à redescendre, on se reprend un petit coup de jus. La frontière est fermée. (Mais on peut dormir sur le parking). J’explique plus clairement; nous sommes officiellement sortis du Pakistan, nous sommes entrés en Iran, mais c’est la fin de la journée et il n’y a plus de personnel pour remplir nos papiers d’entrée dans le pays. Nous sommes donc bloqués là, dans un espèce de no man’s land, entre 2 pays. Julien pète un cable, à tel point qu’on menace de nous faire retourner au Pakistan. Pas question. On se résigne, on accepte, on n’a pas le choix. Je manque de me mettre à pleurer en voyant l’état du camping car, il est sans dessus dessous, y’a du sable PARTOUT, on est à bout, et il va falloir se taper un ménage de fou si on veut pouvoir dormir dans un lit et pas à la plage, et pouvoir manger autre chose que du sable.
Les militaires viendront plus tard prendre la température et s’assurer que tout va bien pour nous. Le côté iranien nous fait sourire. On explique nos péripéties, on s’excuse, et ça va mieux.
C’est quand même ce qu’on appelle une belle journée de m****.
Le lendemain, on se précipite pour faire nos papiers, les ennuis ne sont pas finis. Le camping car est HS, et on a les boules. On trouve une autre camionnette pour nous remorquer.

C’est pas jojo non plus, et ça coûte un peu cher. 10 km plus tard la remorqueuse tombe elle aussi en panne.
Nous sommes à un checkpoint militaire. On nous passe un savon parce que nous n’avons pas d’escorte. De une, on ne savait pas qu’on devait en avoir une. De deux, toutes les escortes sont toujours réquisitionnées pour les motards pakistanais. Les militaires nous souhaitent bonne chance, on demande pourquoi! « Vous voyez les montagnes là bas? »
« C’est Daech, et parfois ils viennent. »
On se sentait moins « proie » côté iranien, même si je le répète encore, nous ne nous sommes jamais senti en danger au Pakistan.
Une demi heure plus tard nous repartons, et atteindrons Zahedan dans l’après-midi.
Rien que ça, ca nous a usé. Heureusement, on ne savait pas que la suite serait pire! Je ne sais pas si on aurait eu la force d’affronter tout ça.
A ce moment là, nous sommes sur le parking d’un hôtel et avons pris une chambre. Le camping-car est une île à lui tout seul, c’est dommage, il n’y a pas la mer, ça aurait été marrant. Va falloir nettoyer tout ça, mais avant on préfère avoir un verdict pour le moteur. Faire venir un garagiste relève de l’exploit. Pas envie, pas le temps et puis c’est l’Aïd… Faut que je vous explique aussi que l’intégralité du parc automobile en Iran roule à l’essence, le diesel c’est pour les camions. Et puis Citroën n’est pas une marque récurante ici.
Alors le peu de personnes qu’on arrive à déplacer n’y connaît rien.
Dans quel état d’esprit on est à ce moment là? Ben on est presque sûr, au bruit, quand on arrive à démarrer Polo, que le moteur est mort. Confirmation de Papa Caco par téléphone, qui n’est pas là mais qui connaît les symptômes.
On est un peu perdus. On a plusieurs options… Stopper le voyage, abandonner Polo ce qui revient à le perdre, perdre sa valeur, la valeur de la caution du carnet de passage et finir notre trip en eau de boudin.
L’autre, acheminer le camping-car à Téhéran dans un garage qui gère, et qui pourra peut-être réparer ou changer le moteur.
Clairement on choisit la deuxième option. Mais moi j’en ai un peu marre des problèmes mécaniques et je ne sais pas combien de temps je serai capable d’attendre. J’ai un très mauvais souvenir de Katmandou. Ju est plutôt en mode, « je suis préparé à ça, donc ça ira. »
Nous sommes toujours restés en contact avec nos amis Mohamed et Leyla de Teheran, et nous avions prévu de voyager un peu en Iran ensemble. Ils s’inquiètent vraiment de nos problèmes mécaniques et de l’endroit dans lequel nous sommes. Mohamed nous donne un sérieux coup de main lorsqu’il s’agit de trouver une dépanneuse, une VRAIE, pour emmener Polo à la capitale, soit 1500 km plus loin. A Zahedan, personne ne parle anglais, Mohamed nous assiste par téléphone. Assiste plutôt Ju, qui se livre à l’exercice de toutes ces démarches pendant que je m’occupe des enfants à l’hôtel.
D’ailleurs lors de ces jours de recherches, Ju se fera arrêter à de nombreuses reprises aux Check point de la ville et se fera remonter les bretelles parce qu’il se déplace seul sans sécurité.


Le verdict tombe. Dépanneuse, il n’y a pas. Mais il y a ça:

Ok. Mais on fait comment pour monter Polo là dessus? Il n’y a pas de rampes.
Voilà ce qu’ils nous trouvent:


Flippant! Et on a raison! A peine le camping-car est levé que tout un tas de choses se mettent à plier: le marche pied, la tonnelle sous l’effet des chaînes, le pare choc qui casse. On crie « STOOOOOOP »! Allez les gars, vous remballez la grue. On s’apercevra plus tard que la pare brise a fissuré de chaque côté. Je n’ose imaginer les conséquences si on était allé jusqu’au bout, un camping-car qui explose littéralement en plein vol.
Vous n’avez pas les données temporelles, entre l’attente des garagistes et la recherche de la dépanneuse, nous sommes à Zahedan depuis une semaine déjà. Et c’est encore une journée de perdue.
Ju repart à l’assaut le lendemain. Nouveau camion, il fait les papiers, ils viendront chercher Polo le jour suivant. Ils arrivent avec une petite dépanneuse, trop petite pour porter Polo. Ils décident donc de le tirer jusqu’à:

Un lopin de terre à l’extérieur de la ville! Et voilà! En route pour Téhéran ce soir!
Nous ne voyageons pas avec notre compagnon de route mais avons décidé de prendre le train. Plus rapide (22h tout de même) et confortable pour les enfants. Mais il nous faut attendre 3 jours de plus, il n’y a plus de places.
Nous apprenons le lendemain que Polo n’a pas quitté Zahedan. Manque l’autorisation de la police. Que nous avions obtenu lors de lors de l’essai avec la grue, et que les nouveaux chauffeurs n’ont pas voulu prendre. « C’est bon, il n’y en a pas besoin! ». Rebelotte, Ju doit courir au poste de police, et se battre, parce qu’ aujourd’hui ils ne veulent plus nous le donner. 3 heures de plus mais c’est bon, nous l’avons. Petit cadeau « bonus » en guise d’excuse de la part des policiers, un petit bout d’une chose qui se fume et qui rend joyeux… Mais qu’allons-nous bien faire de ça ?😁

On réserve enfin nos billets de train et attendons impatiemment le fameux jour du départ.
Heureusement, quelques voyageurs sont de passage pendant notre séjour ici. Zahedan est une ville de transit pour les gens venant ou partant au Pakistan.
Il y a dabord Mark, Australien à moto, avec qui on sympathise et passons nos soirées à siroter le thé, parlant de la vie et de nos voyages respectifs.

Et puis après le départ de Mark, arrive David, Espagnol, on adoooore l’accent anglais des espagnols et leur Buena onda attitude! Il passe au Pakistan, serein mais avec les mêmes questions que nous nous posions lors de notre premier passage: comment ça va se passer?

Inutile de vous dire que ça colle tout de suite entre nous. David partira avant nous de Zahedan sur la route du Pakistan.On se reverra, nous en sommes « presque » sûr.
Et notre Polo, il atterrit où à Téhéran? Une belle chaîne d’entraide s’est formée, et notre fidèle Vincent, toujours là dans les coups dur s’est mis en quête du meilleur garage de Téhéran. Et il l’a trouvé, via des contacts sur les réseaux sociaux. Une famille française avec le même camping-car que nous ayant eu des soucis le rencarde.
De sorte que lorsque Mohamed appelle les mécanos, ils sont déjà au courant de notre problème et nous attendent, cette famille française les ayants informés.
Ce garage est spécialisé dans la réparation de moteur, jouit d’une excellente réputation et adore les challenges: les véhicules de voyageurs de toutes tailles et de toutes marques. David, notre ami espagnol est passé dans ce garage lui aussi et nous assure que si quelque chose est possible, ce sera là.
On s’inquiète quand même un peu. On a eu du mal à faire monter Polo dans le camion, comment va t’il en descendre? 3 jours plus tard, nous recevons ça:

Le bonheur… Nous sommes rassurés, d’autant plus que nos premiers contacts sont clairs. Ils parlent anglais et ont vraiment l’air de gérer la situation. Ce qu’on apprendra bien plus tard, c’est que ça n’a pas été aussi facile que ça en avait l’air! Débarquement dans un autre garage, dépanneuse trop petite, nouvelle dépanneuse, déchargement devant le garage, voie trop petite, blocage de circulation, camping-car trop long qui touche le sol, cales, reblocage de la route…3h plus tard…😂
Nous prenons le train plein d’espoir.


Et quel train! Une cabine couchette rien que pour nous, thé à volonté, repas sur commande… On admire les paysages… désertiques toujours… et tentons de maîtriser nos 2 fauves qui commencent malgré tout à trouver le temps long au bout d’un moment, et qui n’ont qu’une envie, grimper partout.




Quand vient l’heure du coucher, on est un peu soulagés, enfin, du répis.
On a bien du mal à dormir, le train bringuebalant dans tous les sens et sur le coup des 4h du matin Pablo se réveille et fait des bruits très bizarre. Je pense qu’il vomit, mais il fait en réalité une crise d’asthme. Une crise d’asthme, sans blague, c’est la première fois que ça arrive! On est très inquiet, le mot juste, c’est EN PANIQUE TOTALE! On cherche le contrôleur et on fait arrêter le train. Nous sommes près de Yazd. Ben tient, un an auparavant Pablo avait fini à l’hôpital après avoir chuté d’une chaise. 6 points de suture. Les secours sont appelés, on remballe les sacs, sûr que notre voyage s’arrête là. Les urgences arrivent, diagnostique crise d’asthme. Mais ce n’est pas grave, il n’a pas de fièvre. ??? Ah, d’accord. Un coup de ventoline et ça repart. On nous assure que tout ira bien jusqu’à Téhéran, et les médecins s’en vont la ventoline dans leur sacoche. Non, on n’en a pas besoin.
Tout Le Monde au lit, et là croyez-moi, on roupille. 2 heures plus tard, rebelotte. On connaît la chanson, nous arrivons dans une gare, le train est arrêté et on attend les secours. On refait les bagages… reverdict crise d’asthme, et cette fois on demande à garder la ventoline. Nous pouvons rester dans le train, fin du trajet sans encombres. Enfants HS, parents HS, nous arrivons à Téhéran avec 3 heures de retard. (Non, ce n’est pas de notre faute 😜).
Mohamed et Leyla nous réceptionnent et nous allons directement au garage. On fait enfin connaissance de Salim (le père), et Soroush (le fils).
Ils vont commencer à démonter le moteur, ce qui prendra déjà plusieurs jours.
Pendant ce temps là, on profite de Mohamed, Leyla et leur famille, qui nous accueillent cœur et bras grands ouverts. C’est bon de les revoir. Ils nous bichonnent à l’iranienne, on ne manque de rien! Ils nous mettent même à disposition un appart qu’ils louent à plusieurs amis et dans lequel nous resteront plusieurs jours.



Mohamed est magicien à ses heures et amuse la galerie, tandis que Leyla à la gentillesse de laisser les enfants retourner sa chambre!

Julien va au garage de temps en temps et quand le moteur est ouvert, Soroush nous envoie un message. « On vous attend, bad news ». On saute dans un taxi.
Voilà, il y a du sable partout dans le moteur (ça on le savait), les 4 pistons foutus, les cylindres à usiner, l’arbre a came, tous les roulements foutus… il a même fallu en fabriquer sur mesure ici car on ne les trouvait pas en Europe. Gros chantier!
Bad news, pas tant que ça pour nous, la very bad news qu’on redoutait c’était de ne PAS pouvoir réparer, alors que ça ne semble pas le cas. Ils sont motivés au garage, vont essayer de trouver les pièces en Iran, et si ce n’est pas possible, les commander en Allemagne. On est un peu surpris, puisqu’à cause de l’embargo (sanction affligé par les américains), il est impossible de recevoir des colis en Iran. C’était passé juste l’année dernière lorsque nous attendions nos passeports renvoyés en France pour faire nos visas pakistanais. Mais au garage ils sont positifs, c’est monnaie courante pour eux qui réparent des moteurs venant de toute l’Iran et comme je l’ai dit, des voyageurs sur roues.
On se met à y croire aussi, et décidons de regagner nos pénates, c’est à dire la vie dans le camping-car, au garage. On veut suivre ça de près, et remettre de l’ordre dans Polo, toujours envahi par le sable. Sans mentir, la pelle et le seau sont bien appropriés! Chapeau, lunettes et crème solaire, À LA PLAGE! Y’en a partout, dans les placards, les lits, les rideaux, les fenêtres, à l’avant, l’arrière, les soutes…3 jours pour y voir clair, et encore aujourd’hui on continue d’en enlever.

Ce sont des dizaines de pelles comme ça qu’on a ramassé. On découvre aussi que le chauffeur a dû se taper un pont, puisqu’on trouve malle de toit dans le camping-car, défoncée et que l’échelle à l’arrière aussi, ainsi que le jerricane d’essence. Cooool!
Vivre au garage, quelle idée?! Ce garage là n’est pas celui de Katmandou. Très important, il est grand, dans une cour fermée, c’est à dire que nous sommes protégés de la route. Le plus, c’est que c’est plutôt propre pour un garage!

Un autre problème vient s’ajouter à nos soucis mécaniques. Il est impossible de retirer de l’argent au distributeur, spécificité du pays que nous connaissons, et que nous avions anticipé mais pas au point de pouvoir régler une facture de ce genre, et vivre à côté.
Va falloir trouver une solution. D’autant plus que Ju a des problèmes dentaires et qu’il va devoir se faire poser un implant. Oui, ici, les prix défiant toute concurrence.
On va dans les bureaux de change, échec. On trouve un western union, fermé depuis 2 ans. On frappe à l’ambassade de France, on nous ouvre la porte! On nous reçoit, on nous aide. Il est possible en cas de situation urgente de se faire transférer de l’argent via le trésor public. Soyons honnête, durant tout notre périple, toutes les ambassades nous ont reçu avec un ton hautain et une humeur massacrante. En Afrique, j’ai le souvenir que c’était tout l’inverse. Bref, on est content. Merci la France! Le consule nous reçoit dans son bureau et nous met en garde… vous êtes en sécurité en Iran, pas de problème avec la population mais évitez de prendre des photos, bannissez l’usage du drone (on n’en a pas), la police du gouvernement arrête les étrangers sous prétexte d’une banale photo de rue, et vous jette en prison. On a quand même pris une petite remontrance parce que les voyages en Iran sont formellement déconseillés depuis 2 mois par le ministres des affaires étrangères. Quand il nous demande par où nous sommes rentrés et comprend que nous venons du Pakistan un petit sourire se glisse au coin de sa bouche: » vous vous fichez de ce que je vous dit j’imagine »!
Pour le coup c’est pas vrai. Nous savons ce que nous faisons et écoutons ses conseils. Et oui, on a ressenti plus de tensions cette fois que lors de nos 2 précédents passages.
Nous en aurons la confirmation plus tard, en apprenant que plusieurs voyageurs étrangers sont détenus à la maison d’arrêt de Téhéran, pour usage de drone près d’une zone militaire, et soupçonnés d’espionnage. De toutes façons, ce n’est pas au garage qu’on risque grand chose! Nos réserves d’argent étant limitées, on ne se paye pas le luxe de faire du tourisme et de parcourir le pays.
Revenons en à nos moutons, la panne. Pas de pièces en Iran, on commande le nécessaire en Allemagne, via le frère de Salim, qui a un garage à Frankfurt. Et tout ça, ça prend du temps, presque 10 jours sont écoulés quand la commande est finalisée.
Il faut à présent les acheminer. D’abord par DHL jusqu’à Dubaï puis de Dubaï une agence spécialisée les envoie par avion à Téhéran. L’inquiétude monte, parce que les douanes iraniennes ont pour réputation de n’être pas très pressée. Mais tout se passe finalement au mieux, c’est à dire en quelques jours.
Ce que je dois vous dire aussi, c’est que notre carnet de passage (passeport de Polo), valable un an, arrive à expiration le 24 septembre, soit 15 jours plus tard. Au vu de ce qui se passe avec les voyageurs, on ne compte pas prendre le risque de sortir au delà de cette date. Encore une contrainte.
Alors l’état d’esprit à ce moment là? Eh bien Gaël, surnommé Chamboulemen (coucougnettes en langue farci parce qu’il a très souvent les fesses à l’air) s’est bien adapté, il se fait à tout vu l’âge auquel il a commencé de voyager. Pablo est ébahi au garage, avide de comprendre la mécanique, s’est trouvé des habits de boulot, travaille sur la machine dès qu’il peut, ou avec Soroush sur les voitures. Cependant le temps commence à être long pour lui, et il réclame un retour en France avec des copains français.




On le remarque d’ailleurs lorsque d’autres voyageurs belges, Maelys et Antoine, qui parlent français arrivent, et que notre petit bonhomme ne les lâche pas d’une semelle! Et nous, on est content d’avoir des nouveaux copains, même si leur passage est de courte durée.



Ju est plutôt comme Pablo, c’est cool et l’ambiance au garage est très bonne et festive mais le temps est un peu longuet parfois. Il s’est fait opérer pour poser les implants et le dentiste a « malencontreusement » cassé la dent d’à côté. Double implant, le moral en prend un coup.
Et moi, contre toute attente, ça roule comme sur des roulettes. Le jour où nous sommes arrivés au garage, Salim m’a dit en montrant mon voile: « Qu’est ce que c’est que ça? Enlève moi ça s’il te plaît »… Pour moi c’était juste le bonheur. Et puis le garage, les odeurs d’huile, de graisse et d’essence, les mains noires, les cigarettes de Salim et le cendrier piston de camion, les petits bouts de papiers sur lesquels il prend des notes et qui traînent partout, la nappe de la table… Toutes ces petites choses que vous ne comprenez sûrement pas mais me rappelle un être cher, mon papa! J’ai un peu l’impression d’être à la maison, même bonne humeur et ambiance festive.




Nous partageons tout avec Salim et Soroush qui sont d’une infinie gentillesse et avec qui nous nous lions sincèrement d’amitié. Un mois de vie là bas au total tout de même. Nous goûtons la cuisine iranienne maison le midi, et en général le soir, c’est nous qui cuisinons… On s’est installé quoi, y’a notre linge qui sèche dans la cour, la piscine des enfants à la bonne franquette.







On fêtera mon anniversaire là bas avec un invité de marque, un animal rose avec une queue en tire bouchon! Sympa comme cadeau! Et ne croyez pas que notre foie est resté au repos… dans le pays des interdits tout est possible! Et chaque soir après le boulot, when « the wall is black » autrement dit quand le mur d’en face devient noir, c’est l’heure de l’apéro… un petit schnaps maison que nous aurons goûté, encore et encore. « Salamati my friends » (santé)…
En parallèle, nous voyons souvent Mohamed et Leyla, on se promène, on visite un peu la ville, où mangeons tout simplement ensemble. Ils sont aussi venus nous voir au garage, chouette les copains!







Il ne faut pas l’oublier, l’Iran, c’est beau. Heureusement, nous y avons déjà goûté il y a un an.
Nous avons reçu les pièces, mais les travaux n’avancent pas trop. Voici le temps de fêter Imam Hussain (Quand l’Iran organise des cérémonies de deuil, qui marquent le jour de l’anniversaire de la mort de son icône mort en martyr Imam Hussein) pendant plusieurs jours, la ville est morte, personne ne travaille (sauf Salim et Soroush). Le moteur est en sous traitance dans un autre magasin, en attente lui aussi.


Defilé durant lequel le peuple vêtu de noir se flagelle en compassion pour le martyre.
Le temps passe, et le 24 septembre approche. On récupère enfin le moteur. Reste encore un peu de nettoyage, l’assemblage.



Comme nous n’aurons pas le temps de vraiment tester le moteur avant de partir, les gars décident de le démarrer avant de le remonter sous le capot.
Et le 23 au matin commence le remontage dans Polo…
Dur journée! Beaucoup de boulot en un temps restrein, et un départ en queue de poisson lui aussi, puisque nous partirons précipitamment. Nous avons de la route à faire pour atteindre la frontière en temps voulu.
Voici une petite vidéo faite par le garage qui résume tout ça…
On part le portefeuille léger, 😰… Et oui, les pièces, l’expédition, les passeurs pour contourner l’embargo, la sous traitance et la main d’œuvre, bonjour les dégâts. C’était pas prévu au programme.
Enfin Polo est sur pattes, et ça, c’était inespéré.


Une dernière photo, et c’est parti, le cœur bien lourd. On se reverra hein, on se l’est promis…
Une course contre la montre s’engage alors, nous roulons toute la nuit. Enfin Ju, et j’essaie de dormir pour prendre le relais le lendemain. A 4h du matin, un gros bruit vient du moteur. on s’arrête sur le bas côté. Heureusement, y a un peu de place (en bord d’autoroute 😬, mais ça ira). C’est Ju qui trouve le problème tout se suite, on a perdu le boulon qui tient la poulie qui alimente le moteur (pompe à eau, pompe à vide donc freins, alternateur.)
On est au milieu de nulle part dans une partie un peu désertique de l’Iran. Ju ne dort pas et essaie d’arrêter des poids lourds. Ce sont les chauffeurs turques qui nous prêtent main forte. Comme par magie à 9h du matin, un gars sort un seau plein de vis, écrou, boulon… C’est parti mon kiki! Ju remonte le bordel, resserre les courroies et en route pour la Turquie!







Nous passerons la frontière de Sero, à 22h et respecterons les délais du carnet de passage. Notre carnet expirait à minuit.
Une longue histoire n’est ce pas! J’espère qu’on ne vous a pas perdu le long de la route!
Allez, on finit ce message par un remerciement à Salim et Soroush pour avoir réalisé ce « miracle »! Et pour tous ces moments partagés ensemble. Keep in touch…
Idem, un grand merci à Mohamed et Leyla, ainsi que leur famille, pour leur aide, soutien, accueil et présence. Nous sommes partis un peu en catastrophe et n’avons pas eu le temps de vous dire bye bye… Un signe probablement, nous nous reverrons!
Bye bye Iran!
Bisous à tous!
